Claudiu, un enfant du Transbordeur:
La Fondation
Abbé Pierre Auvergne-Rhône Alpes témoigne
Villeurbanne :
Claudiu, 11 ans,
meurt dans un bidonville
Claudiu a 11 ans et sa vie commence à
Lyon, avec un bidonville pour théâtre, déjà. Par chance, il trouve refuge avec
sa famille dans un village d’insertion des environs. Mais en septembre dernier,
la prise en charge de leur hébergement prend fin, malgré l’alerte lancée par la
structure aux institutions locales sur la situation familiale et notamment
celle des enfants.
Le couple, Claudiu et ses trois frères et
sœurs, se voient contraints de rejoindre le bidonville du Transbordeur, à
Villeurbanne. Les associations et les travailleurs sociaux institutionnels
présents sur le terrain tentent de sensibiliser les pouvoirs publics sur leur
situation. En mars 2020, le juge pour enfants ordonne le placement immédiat des
quatre enfants. Une décision qui doit conduire à l’intervention de la brigade
des mineurs.
Mais rien ne se passe. Et Claudiu est
retrouvé mort d’une overdose, à l’âge de 11 ans.
Les trois autres enfants de la fratrie
sont introuvables…
Ce drame de plus montre avec un éclat
sordide les dysfonctionnements majeurs de nos institutions. Sans vouloir jeter
la pierre à quiconque, on ne peut que s’indigner de constater qu’une série
d’anomalies a fini par engendrer la mort d’un enfant. Aucune des institutions
dont c’est pourtant la compétence et la responsabilité n’est allée à la
rencontre de cette famille, malgré les alertes répétées, laissant Claudiu
à l’abandon d’une situation violente et maltraitante.
La mort d’un enfant, en particulier d’un
enfant en souffrance, est inadmissible et vient immédiatement remettre en cause
la manière dont nous vivons ensemble, celle dont les systèmes de protection
fonctionnent et notre responsabilité à tous, de protéger les enfants dans ce
pays.
La Fondation Abbé Pierre tient à faire
connaître l’histoire de ce jeune garçon de 11 ans, sa courte trajectoire, afin
que l’on ne puisse réduire sa mort à un simple dommage collatéral, engendré par
la misère et la maltraitance, ni renvoyer au silence la mort de Claudiu comme
c’est déjà le cas, seulement 4 jours après les faits.
Que ce drame ait eu lieu dans un
bidonville de Villeurbanne n’est pas le sujet. Le risque pèse ici et ailleurs.
En France, en 2021.
La nécessité collective de faire face aux
difficultés économiques et sociales d’ampleur qui frappent les personnes
vulnérables, comme le contexte de manque de moyens pour agir et les
dysfonctionnements institutionnels, ne doivent en aucun cas nous habituer à
cette banalité de la cruauté. Un enfant de 11 ans, sous notre responsabilité
collective, y a laissé la vie.
En décembre 1953,
l’abbé Pierre dénonçait un effroyable drame : le petit Paul, deux ans,
venait de mourir dans l’incendie de la caravane dans laquelle ses parents et
lui avaient trouvé refuge, au cœur d’un hiver glacial de l’après-guerre.
Devant l’inertie de l’État, il avait fallu qu’il reprenne la parole, le 1er
février 1954, pour que la Nation entière s’indigne du sort réservé aux
personnes en grande précarité. Malheureusement, l’Histoire ne semble jamais
nous en apprendre assez. |
Notre association qui intervient dans les squats, bidonvilles et
tout autre lieu de vie précaire pour la scolarisation des enfants, a plusieurs
fois manifesté son inquiétude pour les familles qui, après avoir été
hébergées, se retrouvent dehors sans accompagnement social, alors qu’elles
cumulent de nombreuses difficultés. Inquiétude aussi pour leurs enfants qui
plus que d’autres ont besoin d’aide, alors qu’ils perdent la protection d’un
lieu d’hébergement et le lien avec l’école, lieu de répit et de visibilité.